Comme prévisible, le RN est sorti en tête du premier tour des législatives avec 33 % des voix, tandis que l’ancienne majorité présidentielle, avec 20 % des voix, devrait perdre entre 65 et 105 sièges de députés. Son coup de force électoral n’aura pas profité à Macron, désavoué par ses propres troupes, mais bien au RN avec qui il est prêt à cohabiter, s’étant présenté pendant toute la campagne comme un rempart contre… « les extrêmes », autant contre LFI que contre l’extrême droite. Macron a fait la politique de celle-ci contre les travailleur·es avec ou sans emploi, contre les immigré·es, contre la jeunesse des quartiers populaires frappée par une répression brutale de la police et de la justice lorsqu’elle s’est révoltée il y a un an après l’assassinat de Nahel. Il a calomnié de façon abjecte en les accusant d’antisémitisme LFI, Mélenchon et tout le mouvement de solidarité avec le peuple palestinien. Quelques jours avant le premier tour, il a ordonné l’arrestation et l’emprisonnement en France, à 17 000 kilomètres de chez eux, de militant·es indépendantistes kanak et une répression brutale en Nouvelle-Calédonie dans la plus sinistre des traditions du colonialisme français.
Bardella a eu beau renier toutes ses promesses prétendument sociales, le RN maintient sa progression dans les milieux populaires dévoyant la haine de Macron et du pouvoir par son abjecte politique du bouc-émissaire contre les étrangers, en l’absence d’une alternative politique à gauche remettant en cause l’ordre social des capitalistes et des riches.
Rien n’est joué cependant. Le Nouveau Front populaire (plus de 28 % des voix) a bénéficié d’une mobilisation des militant·es du mouvement social et de la jeunesse révulsé·es par le racisme, le sexisme et la haine de la démocratie du RN. Et ce malgré les divisions internes du NFP, le retour des Hollande et Strauss-Kahn qui portent une lourde responsabilité dans la progression de l’extrême droite et l’hostilité affichée par certains de ses dirigeants contre Mélenchon et LFI. Lundi, le NFP s’est engagé par avance à se désister automatiquement pour les candidats « républicains » en tête du premier tour… une façon de s’affirmer prêt à cohabiter avec Macron et ses alliés de droite dans un gouvernement d’union nationale. Aucun des partis qui le composent ne remet en cause l’ordre social, le capitalisme et le nationalisme. Dans son programme le NFP a fait allégeance au militarisme, à la défense de l’État d’Israël et au soutien de l’Otan dans sa guerre contre la Russie par peuple ukrainien interposé.
Contre le RN, pas d’autre choix sur le plan électoral que le vote pour le NFP
Pour empêcher le RN d’avoir une majorité absolue, et peut-être même une majorité tout court, il n’y a pas d’autre choix, sur le plan électoral, que voter pour les candidat·es du NFP au 2ème tour.
Mais comme beaucoup, nous n’avons aucune illusion sur la possibilité de faire ainsi échec durablement à l’extrême droite. Par contre, la politisation en cours, la mobilisation des militant·es, des jeunes, de tous·tes celles et ceux qui sont révolté·es par la venue du RN au pouvoir sont un gage précieux pour la suite qui va se jouer sur le terrain social, politique, dans une lutte globale pour les droits sociaux et démocratiques face aux politiques de régression sociale quel que soit le gouvernement qui les mettra en œuvre.
Pas de lutte contre l’extrême droite sans perspective de renversement du capitalisme
Les classes possédantes sont partout à l’offensive parce que leur système, le capitalisme, est en faillite, incapable de maintenir les profits faramineux dont il a besoin et sa propre existence sans surexploiter les travailleurs, accroître le pillage des peuples, détruire la nature. L’exacerbation de la concurrence économique conduit au militarisme, à l’accentuation des tensions guerrières, aux guerres. Cette situation qui existe à l’échelle européenne, dans les vieilles puissances coloniales engagées dans l’offensive menée par les USA et l’Otan au Moyen-Orient et contre la Russie et les puissances émergentes, amène au pouvoir ou aux portes du pouvoir, les forces d’extrême droite auxquelles les classes dirigeantes s’en remettent pour assurer leur ordre social contre les exploité·es.
A travers cette séquence, une fraction de l’opinion ouvrière, militante, de la jeunesse, des femmes, s’affranchit des illusions dans les classes dirigeantes et leurs représentants politiques. L’avenir dépend de notre capacité à faire émerger la perspective d’un changement réel de la société, d’en finir avec le capitalisme. De ce point de vue, les scores qui ne sont pas négligeables des révolutionnaires, de Lutte Ouvrière, et dans une moindre mesure du NPA-R et de Révolution Permanente sont un encouragement, montrent qu’il existe un courant politique d’extrême gauche, indépendant des partis institutionnels, dans la population. Le besoin est grand de nous retrouver, nous rassembler pour mettre nos forces en commun, débattre des voies et moyens de lutter, en même temps que pour nos droits quotidiennement, pour un monde libéré de l’exploitation et des idées réactionnaires qui la justifient. Et pour cela travailler à jeter les bases d'un parti des travailleurs qui fasse des idées socialistes et communistes défigurées et reniées depuis longtemps par les partis du même nom, une perspective crédible.