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Réunion débat du 13 juin 2020 - vidéo d'introduction - Isabelle Ufferte

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Les « jours heureux », dont on parle beaucoup en ce moment, était le titre donné à la brochure qui contenait le  programme du Conseil National de la Résistance de 1944.

Aujourd’hui, alors que le capitalisme révèle comme jamais sa faillite, que de plus en plus de monde commence à mesurer l’ampleur des reculs sociaux et l’engrenage dramatique dans lesquels il entraîne l’ensemble de l’humanité, et alors que la voix de la révolte s’élève d’un bout à l’autre de la planète, portant l’urgence sociale, démocratique et écologique, nombreux sont ceux qui veulent penser un monde nouveau et en cherchent la ou les voies possibles.

Depuis le déconfinement, on voit se multiplier des textes, des appels, à l’initiative de responsables d’organisations de gauche, de syndicats, d’associations qui font référence au CNR et appellent à en retrouver l’esprit.

 Ainsi, dans une tribune dans Libération le 14 mai dernier, Fabien Roussel, secrétaire national du PCF écrivait : «  A la crise sanitaire s’ajoute une crise économique lourde de dangers, en particulier pour le monde du travail. Elle appelle chacun à l’humilité. Elle doit nous pousser à avoir la même ambition qu’en mars 44 quand, en pleine guerre, le Conseil national de la Résistance (CNR) se mettait d’accord sur le programme des «Jours heureux». Ils étaient dans la clandestinité et ils n’avaient ni Internet ni les visioconférences comme nous maintenant ! Mais ils l’ont fait, dans le respect de leur diversité. C’est la même ambition que nous devons avoir pour le peuple de France, pour notre pays ».

Dans le même esprit, une vingtaine de responsables et dirigeants syndicaux et associatifs se sont regroupés dans le collectif Plus jamais ça qui s’est constitué pendant le confinement et qui a publié le 26 mai dernier un « plan de sortie de crise » décliné en 34 mesures. Les signataires expliquent :

« Nous voulons démontrer, à travers l’articulation de mesures de court et de long terme, le pragmatisme et l’ancrage dans le réel de notre démarche. Notre but est de faire la démonstration qu’il existe des alternatives au capitalisme néolibéral, productiviste et autoritaire, et que ces alternatives sont crédibles, désirables et réalisables, à condition que les moyens politiques soient mis au service des objectifs de transformation sociale et de préservation de l’environnement, au lieu de les soumettre aux pressions et désidérata des lobbies.

Du reste, un grand nombre de ces alternatives relèvent d’un déjà-là qu’il s’agit de conforter, de rénover et de généraliser, que ce soient les grands systèmes collectifs mis en place dans le cadre de l’État social (protection sociale, services publics, etc.) ou les alternatives concrètes qui sont souvent autant de possibles si leur généralisation est envisagée ».

Si un certain nombre des mesures avancées posent l’exigence de ruptures radicales avec les logiques en cours, ce plan de sortie de crise se situe sur le terrain institutionnel, comme de bonnes mesures qu’un bon gouvernement pourrait choisir d’appliquer… comme si un capitalisme « non libéral » pouvait voir le jour en s’appuyant sur ce que le texte nomme un « déjà là », un capitalisme différent, plus humain, plus juste, plus social…

Cette vision est on ne peut plus cohérente avec ce que sont un certain nombre des initiateurs de ce plan qu’il s’agisse de Cécile Duflot ancienne ministre de Hollande et aujourd’hui directrice d’Oxfram ou de Philippe Martinez, dirigeant de la CGT, qui le 19 mars dernier signait aux côtés des dirigeants de la CFDT, de FO ou du Medef (entre autres) un communiqué affirmant « le rôle essentiel du dialogue social et de la négociation collective »… Mais nombre de militants essaient de se raccrocher à cet espoir d’un autre monde à portée de main… ou plutôt d’élection alors que les discussions ont commencé en vue de la prochaine présidentielle et que les rivalités ne se cachent plus entre différentes personnalités de la gauche institutionnelle.

Une autre démarche a récemment vu le jour à l’initiative d’un autre groupe de personnalités, autour entre autres des cinéastes Gérard Mordillat et Gilles Perret (auteur des films La sociale et Les jours heureux), de l’écrivain Denis Robert, rejoints par des personnalités telles que Jean-Marie Harribey, économiste membre d’Attac. Ils sont eux à l’origine de la création d’un « Conseil national de la nouvelle résistance » (CNNR). Dans leur 1ère déclaration publiée le 27 mai dernier, ils expliquent :

« Pour mener le combat du jour d’après, nous avons suscité la création d’un Conseil national de la Nouvelle Résistance (CNNR) en nous plaçant sous la tutelle de l’Histoire, des luttes sociales et écologiques contemporaines. Notre ambition est d’offrir un point de ralliement à toutes celles et ceux, (individus, collectifs, mouvements, partis ou syndicats) qui pensent que « les Jours heureux » ne sont pas une formule vide de sens mais le véritable horizon d’un programme politique »… Ils y avancent une série d’objectifs, de mesures, d’affirmations allant de la volonté de « s’attaquer aux désordres où s’est enracinée la crise », de « sortir d’un modèle économique néolibéral », d’ « établir la souveraineté du peuple », d’assurer la paix « par le partage transnational des valeurs de solidarité »… Et ils proposent que la France prenne, je cite : « l’initiative d’une conférence mondiale pour refonder les institutions de la société globale sur les principes de la participation des citoyens et de la coopération loyale entre les peuples. La nation française est un groupe humain qui forme une entité politique souveraine, qui partage des biens communs et qui met en œuvre dans un cadre républicain les valeurs universelles de liberté, d’égalité et de fraternité ».

Ces citations déjà longues ne prétendent pas rendre compte de l’ensemble de ces textes et appels (pour les camarades qui le souhaiteraient, ils sont disponibles sur le net) mais elles permettent de mettre le doigt sur une logique commune.

Ces textes, ces initiatives participent d’une même illusion : celle qu’il serait possible de changer la société en prenant de bonnes mesures, sans poser la question de qui contrôle l’économie, qui décide, sans remettre en cause l’appropriation de l’ensemble des richesses créées par une minorité de possédants. Comme s’il s’agissait de choix idéologiques et non d’une logique de classe. Et en conséquences, ces textes en appellent non pas à la lutte de classe mais à réunir la « nation », le « peuple », un « groupe humain qui partage des biens communs ».

Les  « Jours heureux » de la gauche à Macron…

Et il n’y a pas qu’à gauche que fleurissent les références aux jours heureux et à la Résistance

Le 13 avril dernier, Macron déclarait dans son allocution : « Mes chers compatriotes, nous aurons des jours meilleurs et nous retrouverons les Jours Heureux. J'en ai la conviction »… Une provocation de plus alors même que les classes dominantes et le gouvernement préparaient activement les « jours d’après » en appelant l’ensemble de la population à se serrer les coudes et à se préparer aux efforts de guerre : Philippe expliquait au même moment : « je crois que si nous voulons retrouver notre prospérité […] il faudra collectivement que nous nous en donnions les moyens par le travail, la solidarité, l’inventivité ». Depuis les déclarations du gouvernement sont venues préciser ce que doivent être pour eux les jours d’après : « Garder le cap et accélérer ». Cela alors que sur le seul premier trimestre, près de 500 000 emplois ont été supprimés dans le pays ! Pas question d’abandonner la retraite à point… tout en promettant de changer la méthode : il entend associer le plus possible les « partenaires sociaux » et les élus locaux.

Les gouvernements de la bourgeoisie ont de tout temps accompagné leurs déclarations de guerre aux travailleurs d’appels vibrants à « l’union nationale », à la solidarité avec les patrons et multinationales françaises…

Le Maire, Macron, Philippe, Pénicaud nous expliquent que ce qui est bon pour les capitalistes serait bon pour tout le pays. Cela nous vaut une campagne « consommons et achetons français »… tandis que le gouvernement arrose les entreprises de centaines de milliards au nom de l’emploi !

Un large débat s’engage

Alors, face à l’ampleur des conséquences de l’offensive des classes dominantes, de l’« écroulement » de leur système, pour reprendre l’expression d’Edouard Philippe, beaucoup parmi les militantes et militants du monde du travail et plus largement parmi les travailleurs et la jeunesse, s’interrogent, veulent agir.

Au sein des collectifs de lutte, dans les syndicats, dans les mobilisations, les débats s’engagent sur comment préparer un autre « après », quelle société et quelles voies, quels moyens pour la construire… et sur la nécessité de réorganiser la production pour rompre avec la logique destructrice de l’économie de marché et du profit.

En faisant référence aux « jours heureux », Macron espère raviver l’union nationale qui a présidé au CNR pour « redresser l’économie française ». Une injonction qui est faite aux travailleurs… et une invitation à la « gauche » à prendre part à la cogestion de la crise…

Il se trouve que la « gauche » parlementaire et syndicale a d’autres espoirs que de rallier l’union que promeut Macron… de plus en plus contesté et dont le camp est si divisé qu’il a perdu la majorité absolue à l’Assemblée...

Mais en reprenant à leur compte les mêmes références, les organisations de gauche s’inscrivent de fait dans une même politique d’union nationale avec la bourgeoisie. A moins de deux ans de la Présidentielle, le mythe des jours heureux est entretenu comme la preuve qu’une issue institutionnelle est possible quand les forces s’unissent…

Et cela rend d’autant plus nécessaire de se pencher quelques minutes sur ce qu’à réellement été la période du CNR,   quels sont les intérêts que ce gouvernement d’unité nationale d’alors a défendu et sauvé dans une période de profonds bouleversements, alors que la bourgeoisie française comme l’ensemble des bourgeoisies mondiales craignait une vague révolutionnaire comme aux lendemains de la 1ère guerre mondiale en 1917. Car la question pour la bourgeoisie était bien celle de sauver son système et son pouvoir à l’issue de la barbarie sanglante dans laquelle la crise du capitalisme venait d’entraîner les peuples du monde entier.

Derrière le mythe du CNR, l’union nationale pour sauver la bourgeoisie française

Gilles Perret, qui fait partie des initiateurs du CNNR, par ailleurs proche de François Ruffin, déclarait dans une interview dans Les Inrockuptibles il y a peu : « le CNR est la grande période pendant laquelle l’État, les citoyens, le peuple reprennent le pouvoir sur l’économie » et il expliquait que son « programme a été gagné dans le rapport de force. Les forces progressistes, principalement communistes à l’époque, étant fortement investies dans la résistance, le rapport de force dans la négociation pour écrire un programme était en leur faveur. Les partis de droite, ultraminoritaires, ont été obligés de signer, car ils ne représentaient rien à la Libération. Toutes les forces politiques en présence ont donc signé un programme à forte inspiration communiste et socialiste ».

C’est une façon pour le moins édulcorée et déformée de rendre compte de ce qu’a été le CNR, de la politique de la bourgeoisie et de celle du PCF et de la SFIO. On ne peut comprendre cette période qu’en prenant la mesure de ce qu’étaient les rapports de forces entre la bourgeoisie et la classe ouvrière dans l’immédiat après guerre.

La bourgeoisie dans son ensemble, à l’échelle internationale, craignait une montée révolutionnaire, non seulement le soulèvement des travailleurs mais également celui des peuples des empires coloniaux qui s'engageaient dans la lutte pour rompre les chaînes de la domination coloniale.

En France, la déroute du régime de Vichy laissait le pays exsangue, totalement désorganisé et se posait de façon brûlante la nécessité de reconstruire non seulement l’industrie, les transports, l’ensemble des infrastructures, mais également un appareil d’Etat. Les Etats Unis et l’Angleterre s’y préparaient activement en préparant le débarquement et la « libération »… 

La bourgeoisie française qui avait fait le choix de De Gaulle entendait bien contenir les appétits américains et anglais,  se donner les moyens de remettre elle-même sur pied son appareil d’Etat et son appareil de production, remettre elle-même la classe ouvrière au travail et lui faire se retrousser les manches pour reprendre l’expression de Maurice Thorez en juillet 1945 pour appeler les travailleurs à mener ce qu’il appelait la bataille du charbon.

Quand Gilles Perret explique que « le CNR est la grande période pendant laquelle l’État, les citoyens, le peuple reprennent le pouvoir sur l’économie », il concentre cette vision complètement mythifiée d’un Etat, d’une économie suspendus dans les airs, au-dessus des classes sociales, une société d’où aurait disparu l’exploitation…

Et il y un gros « angle mort » dans l’histoire que certains nous comptent du CNR : sa politique coloniale et la répression sanglante qu’il a organisée face aux révoltes des peuples colonisés pour maintenir le joug de la domination et du pillage des colonies en Algérie, en l’Indochine, à Madagascar...

Constitution du CNR

Quelques mots pour revenir sur l’origine et la constitution du CNR qui est officiellement proclamé le 27 mai 1943.

De Gaulle a confié à Jean Moulin la tâche de rassembler les différents réseaux de résistance qui existent alors de façon totalement désorganisée. La bourgeoisie française a progressivement fait le choix de De Gaule dont l’objectif est de constituer un gouvernement de la France dite « libre » et pour cela d’unifier un mouvement composé d’une mosaïque de groupes et de réseaux, de « maquis » très divers. Moulin va ainsi s’attacher à regrouper depuis des généraux de l’armée « libre » jusqu’aux réseaux communistes, en passant par toutes les forces hostiles à Vichy dont certaines très fraîchement converties... sans oublier des groupes issus de l’extrême-droite maurassienne et de l’Action française, germanophobes et antisémites qui refusent la défaite et la reddition de Pétain…

Le CNR de 43 va ainsi être composé de représentants des différents réseaux de la résistance mais aussi des 2 syndicats de l’époque (la CGT et de la CFTC), et des 6 principaux partis français : le PCF, la SFIO, les radicaux, les démocrates-chrétiens, l’Alliance démocratique (droite) et la Fédération républicaine (droite catholique très conservatrice).

Son programme adopté en mars 1944 vise à redémarrer et réorganiser l’économie et prévoit pour cela le « retour à la nation » de certaines grandes entreprises secteurs clés (énergie, transport, banques, industrie) et leur nationalisation et, pour les travailleurs, un « plan complet de sécurité sociale » et le droit à la retraite.

La légitimité du PCF au service de la bourgeoisie pour sauver son système

Comme le dit Gilles Perret, le programme « a été gagné dans le rapport de force », mais la question est par qui et de quoi est fait ce rapport de forces ?

La bourgeoisie française était prête à bien des concessions pour sauver son existence, pour remettre sur pied de son appareil d’Etat et son industrie… mais aussi pour sauver son empire colonial et y contenir la montée des mouvements indépendantistes.

Pour cela, De Gaule fit le choix d’utiliser le crédit que le PCF et ses militants avaient au sein de la population et de la classe ouvrière et d’en payer ce qu’il estimait en être le prix. Le PCF d’alors n’avait pas grand-chose à voir avec ce qu’il est devenu. Il comptait à ce moment là 500 000 membres, ses militants étaient nombreux et influents dans les entreprises, les quartiers. En 1945, il obtenait 160 députés (26 % des voix et détenait 2000 municipalités. La CGT (seul syndicat ouvrier avec la CFTC) comptait 5 millions d’adhérents.

Durant 3 années cruciales, de juin 1944 à mai 1947, le PCF a été partie prenante des différents gouvernements, apportant à De Gaulle une légitimité déterminante, mettant son crédit et son autorité au service du sauvetage de la bourgeoisie française. Il a mené la « bataille de la production » pour faire accepter aux travailleurs de « reconstruire la France » malgré les pénuries, les rationnements. Thorez appelait à retrousser les manches.

En mai 45, le PCF était au gouvernement alors que l’aviation bombardait Sétif, Guelma et Kherrata en Algérie, faisant plusieurs dizaines de milliers de victimes parmi les manifestants algériens qui revendiquaient des droits démocratiques.

Le 12 mai, L'Humanité appelle à « châtier impitoyablement et rapidement les organisateurs de la révolte et les hommes de main qui ont dirigé l'émeute » avant d’appeler quelques jours plus tard à cesser la répression devant l’ampleur et la réalité des massacres.

La même année, le gouvernement envoyait un corps expéditionnaire en Indochine pour tenter de circonscrire le mouvement indépendantiste vietnamien, début là aussi d’une guerre sanglante. En 1947, c’est à Madagascar que l’armée française faisait régner la terreur…

Alors oui, en 1946, Ambroise Croizat, ministre PCF du Travail, fut celui qui mit sur pied la partie du programme du CNR qui concernait « la Sécu », chargé d’améliorer le système de protection sociale et de retraite. Des acquis indéniables, qui ont été obtenus grâce au rapport de force imposé par la classe ouvrière et à la trouille bleue qu’elle inspirait à la bourgeoisie craignant une nouvelle montée révolutionnaire.

A cette période, la bourgeoisie française n’est d’ailleurs pas la seule alors à céder de nouveaux droits. D’autres pays vont renforcer les systèmes de protection sociale existants dont l’Angleterre où est mise en place en 1945, entre autres, la gratuité totale des soins et le versement d’allocations familiales.

De Yalta à la chute des empires coloniaux

Pour les bourgeoisies impérialistes, l’urgence est la reconstruction de l’économie et à assurer le maintien de l’ordre capitaliste.

En février 1945, une conférence réunit à Yalta Roosevelt, Churchill et Staline. Ils y discutent la fin de la guerre et vont s’y partager le monde en deux blocs, l’Ouest et l’Est, chacun s’engageant à faire la police dans sa zone d’influence.

Les USA, qui sont en train d’asseoir leur hégémonie sur le monde, et la vieille Europe ont besoin de Staline pour participer au maintien de l’ordre mondial, combler les vides étatiques, reconstruire des appareils d’Etat dans les pays ravagés par la guerre.

Ils ont aussi besoin, dans ce moment charnière, du crédit que l’URSS et les partis communistes ont conservé au sein de la classe ouvrière. Un crédit que le PCF met en France au service de De Gaulle.

On ne peut comprendre ce qu’a été le CNR, sa raison d’être, la nature du « compromis social de 1945 » qu’en comprenant ce qui est en train de se jouer dans les rapports de forces et la lutte de classes à l’échelle internationale.

Les années qui vont suivre, bien mal nommées les « 30 glorieuses », vont voir les rapports de force économiques mondiaux être profondément bouleversés. Elles vont déboucher dans les années 1970 sur une nouvelle crise économique majeure.

Ces années ont certes été une période de reconstruction économique, entre autre financée par les dollars du plan Marshall dont les USA ont arrosé les pays de l’Ouest, renforçant ainsi leur leadership économique et politique. Mais cette période des « 30 glorieuses » a aussi été celle des sales guerres d’Algérie et du Vietnam et des luttes d’émancipation des peuples se libérant du joug colonial.

L’ensemble des anciennes colonies de l’Europe se soulèvent. Dans la quinzaine d’années qui suit la seconde guerre mondiale, une grande majorité des peuples accèdent à l’indépendance le plus souvent les armes à la main. Pour n’en citer que quelques colonies, la France doit lâcher le Liban, l’Indochine, Madagascar, ses colonies d’Afrique noire ; l’Angleterre l’Inde, le Kenya ; la Belgique le Congo ; les Pays bas l’Indonésie, etc.

A la fin des années 60, la fin des empires coloniaux redessine de nouveaux rapports de force. Elle ouvre en même la voie à une concurrence généralisée.

Les anciens pays coloniaux sont intégrés à marche forcée dans le marché mondial, soumis à de nouvelles relations économiques tout aussi inégales et violentes. La lutte de classe, l’exploitation et les contradictions du capitalisme s’intensifient à l’échelle internationale. Les trente glorieuses vont accoucher d’une nouvelle crise économique.

Dès la fin des années 70 s’ouvre une nouvelle période d’offensive libérale sous la houlette de Reagan et Thatcher… Il ne s’agit en rien de choix « idéologiques » d’une fraction réactionnaire de la bourgeoisie… mais de la seule réponse possible pour les capitalistes pour maintenir leur taux de profit, tenter de sauver leur système, une fuite en avant qui est une question de vie ou de mort pour lui. En France, au début des années 80, c’est un gouvernement de gauche plurielle qui initie le virage libéral, celui du gouvernement Mitterrand-Mauroy qui comprend 4 ministres PC.

En réponse à la faillite des classes dominantes, notre indépendance de classe

Aujourd’hui, un nouveau stade a été franchi : le capitalisme financiarisé domine l’ensemble de la planète Il a mis les  travailleurs du monde entier en concurrence, nivelant par le bas les conditions de vie et de travail de tous.

On le voit en ce moment même à PSA où le PDG fait appel à la mobilité interne du groupe et avait décidé de faire venir des travailleurs polonais de la multinationale pour absorber l’augmentation de la production de son usine d’Hordain dans le Nord. La solution pour lui pour ne pas faire appel aux travailleurs intérimaires tout en disposant d’une main d’œuvre qualifiée et moins payée que les ouvriers français (puisqu’ils l’auraient été au tarif de la convention collective et non aux tarifs de PSA France) … Face au scandale, le gouvernement a fini par intervenir et il semble que PSA vienne de décider au final d’y renoncer, avec un même mépris pour les travailleurs polonais que français !

Les derniers acquis obtenus par les travailleurs des pays riches au cours des 30 glorieuses finissent d’être remis en cause : retraites, couverture sociale, droit du travail, statuts, tout ce qui relève du salaire directement ou indirectement, est laminé.

Dans le monde entier, les mesures prises par les classes dominantes pour tenter d’éviter leur « écroulement » accélèrent brutalement l’offensive contre l’ensemble des droits économiques, sociaux et démocratiques des travailleurs et des populations.

C’est à ce « sauvetage » que Macron appelle la gauche à s’associer en faisant référence aux « jours heureux ».

S’il n’est pas question pour elle de se compromettre avec Macron aujourd’hui,  on a vu que dans le passé, la gauche institutionnelle a su prendre ses responsabilité. Que ce soit en 1936, en 1945, pendant la guerre d’Algérie, lors de l’offensive libérale des années 1980 et plus récemment, le PS, le PCF, les Verts ont fait la démonstration de leur utilité pour défendre le système, au sein de gouvernements divers, de gauche plurielle ou de cohabitation, ensemble ou séparément.

Aujourd’hui, un certain nombre de dirigeants de la gauche syndicale, parlementaire ou associative appellent l’État à « des interventions massives dans l’économie », à « retrouver l’esprit de 45 ».

Dans l’appel « Plus jamais ça ! Préparons le jour d’après », les signataires écrivent en préambule : « En mettant le pilotage de nos sociétés dans les mains des forces économiques, le néolibéralisme a réduit à peau de chagrin la capacité de nos États à répondre à des crises comme celle du Covid […] Les politiques néolibérales ont affaibli considérablement les droits sociaux et le gouvernement ne doit pas profiter de cette crise pour aller encore plus loin ».

Comme si en appeler au gouvernement pour pouvait avoir un sens ! Et comme si le « néolibéralisme » était une option et non la politique du capitalisme mondialisé qui ne peut se survivre qu’en intensifiant l’exploitation, qu’en soutirant toujours plus de plus-value à la classe ouvrière qu’elle vive et travaille à Pékin, Bombay, Minneapolis, Bordeaux ou Mexico… qu’en mettant partout les travailleurs et les opprimés en concurrence, en cherchant à diviser, en secrétant le racisme, partie intégrante du système d’exploitation.

Combattre les politiques néolibérales, mettre un coup d’arrêt à la folie du capitalisme qui emporte le monde entier dans sa fuite en avant et son « écroulement », ne peut se faire sans transformation révolutionnaire de la société, sans intervention des exploités eux-mêmes pour arracher le pouvoir des mains des classes dominantes, de la finance, se réapproprier les moyens de production, prendre le contrôle de l’économie pour répondre aux besoins de la collectivité.

Pour qu’il n’y ait « plus jamais ça », pour « reconstruire ensemble un futur écologique, féministe et social » comme nous y invite l’appel, il n’y a pas d’autre voie que l’intervention directe des exploité.e.s, des prolétaires, de la jeunesse, pour exercer leur contrôle sur l’économie et l’ensemble de la société, ici et dans le monde entier.